Le dimanche midi chez Félix
Le dimanche midi chez Félix, c'est poissons en beignets. Depuis des années, petits et grands enfants, belles-filles et grands-parents dégustent ensemble une "reineta", un poisson du Pacifique proche de la daurade, préparée par les bons soins du grand-père Félix. Et ce dimanche midi ne déroge pas à la règle, si ce n'est que deux "gringos" ont été invités à la grande table du salon. Le vin coule, les poissons disparaissent et les langues se délient. Le Chili, la France et même la Suisse, où l'un de ses enfants a émigré, sont au centre du débat. On évoque le tremblement de terre de mars dernier et le fiston, ingénieur en construction, nous explique que la majorité des maisons chiliennes sont construites selon des normes anti-sismiques strictes, ce qui a permis d'éviter le pire. Tous regrettent le coût de l'éducation au Chili, même s'il est possible d'obtenir des prêts de l'état ("A taux zéro" ? "Ho non !") ainsi que le prix de la santé. On aborde aussi le problème énergétique du Chili qui trouve plus simple d'importer du gaz par bateau d'Asie plutôt que d'en acheter à son voisin la Bolivie qui en a en abondance. Ces deux là ne s'aiment pas beaucoup. On discute de sujets aussi sérieux que le vin chilien ou la participation du Chili à la coupe du monde ("Les milieux sportifs s'accordent à dire que le Chili sera la révélation"). A notre grand embarras, on fait bien souvent répéter. Notre "castillano" n'est pas toujours à la hauteur dès lors qu'on s'éloigne du vocabulaire familier des joints de culasse... Il faut dire aussi que les chiliens parlent très rapidement, écorchent la fin des mots et colorent leurs phrases d'impossibles chilénismes. "Catchaï ?" (tu comprends), ce à quoi on aimerait répondre "Ya, te catcho bien". (oui, je te comprends).
Puis, on en vient à notre parcours. Discuter d'un itinéraire est relativement facile au Chili.Le pays est une longue langue de terre coincée entre le Pacifique et la Cordillère des Andes... Aussi longue qu'une ligne qui irait de l'Ecosse au Nigéria ! Mais qui serait large comme la Bretagne. Il y a donc le nord, le sud et une route nord-sud. Nos hôtes nous demandent :
– "Vous allez au sud ou au nord ?
– Au nord !
– Pourquoi le Nord ? Le Sud est plus joli, il y a des arbres ! Le nord c'est du désert et encore du désert... (il faut savoir que la ville et les environs de nos hôtes ne sont pas particulièrement verdoyants)
– Oui, mais en ce moment il fait froid dans le sud et puis les arbres on connait. Pour nous, c'est le désert qui est exotique !"
Pour rompre la monotonie et l'ennui que sera notre voyage vers le nord, Félix et sa famille se creusent la tête pour nous indiquer quelques points de passages intéressants. Allez à la vallée d'Elqui, vous goûterez du Pisco. Et en guise d'introduction, le déjeuner se termine avec un verre de cet alcool de vin.
